Silence de brume, souffle d’Histoire

Aujourd’hui, la pluie est au rendez-vous, comme la veille. Une pluie fine et obstinée, qui efface les contours du paysage. Le vent d’autan ne s’est pas encore levé, demain, sans doute, il viendra balayer cette douceur humide. Ce matin, la brume a déjà enveloppé le Viaduc, mon imposant voisin, le confisquant à notre regard comme un secret jalousement gardé. C’est un temps idéal pour écrire.

Me voilà immergé dans l’histoire de Varennes. J’y retrouve Adrien, je l’apprivoise peu à peu. Il prend forme, s’installe dans mon esprit, s’anime sous mes doigts. Étienne attend son heure, elle viendra bientôt, mais pas encore. Pour l’instant, je vis fidèlement les premières heures de la fuite de la famille royale, cette fuite dont je connais déjà l’issue, mais dont je savoure chaque détour. J’ai hâte d’arriver à Varennes : tant d’idées bouillonnent, impatientes d’exister.

Dolly est là, à mes pieds. Elle sait qu’elle ne peut pas sortir, mais elle est tranquille. Elle veille. Elle m’accompagne dans ce moment feutré où le monde extérieur s’efface et où les mots prennent toute la place.

Je viens d’écrire l’avant-propos : quelques pages pour situer mon histoire dans l’Histoire. Sur les conseils d'Olivier, un lecteur de la première heure, je vais aussi composer une galerie de personnages : ceux qui ont marqué la grande Histoire et ceux qui peupleront la mienne. J’ai hâte de les faire apparaître, de leur donner voix et chair.

Mais les idées vont plus vite que ma plume. Je n’écris pas assez vite. La pluie tombe, la brume persiste, et moi, je me perds avec bonheur dans le passé.